ENSTRAID, la transition écologique sur la bonne voie

Alors que les restrictions d’accès aux zones à faible émission sont appelées à se renforcer dans les années à venir, une association étudiante d’ENSTA Paris explore les possibilités de démocratiser la mobilité électrique en donnant une nouvelle jeunesse à des véhicules thermiques.

Matthieu Dumortier est à la fois passionné d’automobile et très préoccupé par les conséquences du réchauffement climatique. Élève ingénieur à ENSTA Paris, il sait que les transports représentent environ 30% des émissions de gaz à effet de serre du pays. Aussi lorsque, à l’occasion de son intégration à ENSTA Paris, il découvre l’association ENSTRAID et sa Peugeot 205 XT jusqu’à présent utilisée pour faire du rallye-raid, il comprend qu’il tient là une formidable opportunité de réconcilier sa conscience écologiste et sa passion :

Matthieu Dumortier, élève ingénieur ENSTA Paris
Matthieu Dumortier, élève ingénieur ENSTA Paris passionné d'automobile et conscient des enjeux de la transition écologique.

« Cette brave 205 XT était très kilométrée, tenait mal le ralenti, et était un cauchemar en termes d’émission de polluants. Clairement, on ne pouvait pas continuer à l’utiliser en faisant comme si ça n’avait pas d’importance. En tant que futurs diplômés d’une école dont les transports sont un domaine applicatif majeur, il est impératif de donner l’exemple. Alors je suis allé voir le président de l’association de l’époque, Arthur Depret, et je lui ai fait part de mon idée. Très enthousiastes, nous avons débuté le projet avec toute l’équipe d’ENSTRAID. »

Peugeot 205 XT en cours de transition du thermique à l'électrique
Peugeot 205 XT en cours de transition du thermique à l'électrique

Cette idée, elle est devenue légale en France depuis avril 2020. Elle est passée dans le langage courant sous le terme de « rétrofit », et c’est l’art de transformer une vieille guimbarde polluante en véhicule zéro émission. « Le principe est très simple » confirme Matthieu Dumortier : « Remplacer le moteur thermique par un moteur électrique, ainsi que toute la chaîne de traction. » La pratique l’est bien sûr un peu moins.

« Il y a un cahier des charges très rigoureux à respecter au niveau de la puissance et du poids, car le véhicule doit conserver à peu près les mêmes caractéristiques, afin que tous les éléments de sécurité auxquels on ne touche pas (suspensions, freins, rigidité structurelle) conservent la même efficacité. »

Enthousiasmée par l’idée, toute l’équipe de l’association se lance d’arrache-pied dans le projet, et rencontre de nombreux professionnels afin de passer en revue les solutions techniques envisageables pour l’antique 205 de l’association.

« Grâce au Forum Trium qui permet de mettre en contact élèves et entreprises, nous avons pu rencontrer des experts d’EFI Automotive qui nous ont réservé le meilleur accueil à Lyon. Ça n’est pas rien de recevoir l’aide d’un équipementier français qui a une réelle envergure mondiale ! Par leur intermédiaire, nous avons pu rencontrer Lormauto, un professionnel très avancé dans le milieu. Les anciens élèves de l’École nous ont aussi beaucoup aidé par le biais d’une subvention décernée par leur association, ENSTA Alumni.

Le Forum Trium, lieu privilégié de rencontre entre élèves ingénieurs et entreprises, que ce soit pour trouver un stage ou des conseils pour son association !
Le stand ENSTA Paris sur le Forum Trium 2022, un espace privilégié de rencontre entre élèves ingénieurs et entreprises.

Nous remercions également IP Paris, dont nous avons reçu une subvention au travers de l’appel à projet vie étudiante. L’écosystème d’ENSTA Paris offre des opportunités immenses quand on a un projet solide et un peu d’ambition ! »

Si les ambitions sont grandes, les difficultés techniques ne le sont pas moins. « Les moteurs électriques développés actuellement pour l’automobile viennent avec tout un interfaçage prévu pour communiquer avec le reste du véhicule. Or il n’y a rien d’équivalent dans notre 205 ! Nous allons devoir développer nous-mêmes des solutions. »

Autre difficulté, celle liée à la boîte de vitesses manuelle équipant pour l’instant le véhicule. « La boîte de vitesse participe à la rigidité du véhicule. Mais les moteurs électriques fonctionnent avec de simples réducteurs, pas des boîtes de vitesses manuelles. Nous avons sur ce point consulté CirculaCar, une entreprise de rétrofit qui développe des calculateurs permettant d’accoupler les boîtes de vitesses manuelles aux moteurs électriques. »

Devant ces difficultés techniques, les membres de l’association ont revu leurs plans : plutôt que de développer directement une voiture prête à prendre la route, ils ont décidé de progresser étape par étape.

« Nous allons commencer par une preuve de concept : un premier véhicule fonctionnel, peu puissant mais avec une autonomie correcte. Une fois cette démonstration faite, les prochains bureaux de l’association auront pour mission de faire évoluer le véhicule vers quelque chose de plus abouti. » Porté à présent au périmètre de l’Institut Polytechnique de Paris, le projet débutera concrètement à la rentrée prochaine par la création d’un banc d’essai comprenant l’ensemble des éléments nécessaires au fonctionnement d’un moteur électrique.

Le moteur électrique du véhicule démonstrateur ENSTRAID
Le moteur électrique du véhicule démonstrateur ENSTRAID

« Il y a une évidente dimension pédagogique dans ce projet. Tous les membres de l’association vont apprendre à monter et démonter un moteur électrique de A à Z, et gérer les contraintes techniques inhérentes à ce genre de projet. Quand on sait l’importance qu’aura la mobilité électrique à l’avenir, ils vont acquérir un savoir-faire essentiel pour les ingénieurs de demain ! » conclut Matthieu Dumortier.

Une partie de l'équipe ENSTRAID dans l'atelier de l'association
Une partie de l'équipe ENSTRAID dans l'atelier de l'association